Article paru dans le Bing Bang 60,
le Mag Urbain-Dijon
par Carole Desmarais
En 1960 j’avais 5 ans.
Je faisais ma première rentrée
scolaire à l’école privée. C’était à ma demande, en future femme
émancipée peut-être ! J’y partais toute seule, sac d’école au dos
avec ma boîte à lunch en main, toute colorée de bleu foncé, de rouge et
de jaune. Mes premiers repas de façon autonome.
Le midi, j’ouvrais cette magnifique boîte carrée, en métal, qui
contenait mon sandwich au pâté de viande, bien emballé dans du
« papier ciré ». J’en sortais mon thermos aux mêmes motifs que
ma boîte à lunch. Dans le couvercle amovible du thermos je versais mon
lait encore froid. J’avais faim !
La maîtresse d’école, Mademoiselle Proulx, mangeait elle aussi, là-bas
devant, sur son pupitre. Parfois elle passait dans les allées de façon
discrète, élégante et souriante.
Nous étions une quinzaine à
« l’Oiseau Bleu », belle maison du bord de la rivière des
Prairies.
J’admirais sa robe grise cintrée, à la jupe évasée et plissée, sa
coiffure impeccable aux cheveux relevés sur la nuque et ses chaussures à
petits talons étaient l’exemple même de la féminité pour moi !
Mon petit ami Mario portait un nœud papillon au col de sa chemise
blanche, le jour de la photo. Je pris place devant le photographe, avec
son gros appareil noir et carré. Maman se tenait derrière lui et me
faisait des signes que je ne voulais pas comprendre. On me dit d’appuyer
mon visage sur mes mains jointes sous ma joue gauche, en inclinant la
tête... Je souris mais laissai entrevoir mes dents, que maman ne voulait
pas voir.
Je fus réprimandée !
■ CD